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dimanche 8 décembre 2024

Le journal des étudiantes et étudiants de Lyon 3

Raoul Dufy : un artiste haut en couleur

« La Nature devient la stylisation d’une vérité propre à son auteur » écrit Raoul Dufy.

Cette citation témoigne de la vision du monde par l’artiste, qu’il tâche tout au long de sa vie, de représenter à travers le dessin, la peinture, la gravure, et quelques autres médiums. 

Raoul Dufy naît en 1877 au Havre, dans une famille où la musique a une grande place, ce qui est essentiel pour Dufy qui pratique le piano et l’orgue. Dufy réalise sa première formation en travaillant dans un port, ce qui laisse, durant toute son œuvre, une empreinte indélébile. Il est ainsi formé aux couleurs qui auront une place prédominante dans son œuvre. Dufy dira que les formes les plus parfaites pour lui sont celles de la coque d’un bateau et de la carabesque d’un violon, des formes alors très courbées. 

Dufy commence des cours du soir à l’Ecole municipale des beaux arts, il y réalise beaucoup d’aquarelles, un médium qu’il pratiquera tout au long de son existence; puis il entre à l’Ecole nationale des beaux-arts de Paris, dans une période où le dessin reste son médium principal. Pourtant, Dufy va être amené à rencontrer de nouvelles personnalités dont l’influence sera majeure sur son œuvre témoignant d’un homme, et d’un art, construit à travers ces diverses influences. 

L’impressionnisme est le premier marqueur de Dufy avec Eugène Boudin et Claude Monet. Dufy s’attèle à la réalisation s’attachant aux codes de l’impressionnisme pendant un temps, mais ne conserve que très peu de ces codes puisqu’il se distingue par un pinceau plus marqué, prenant des libertés avec l’existence de tâches de couleurs libres, se distinguant naturellement d’un style impressionniste. Les tableaux de cette période témoignent alors de la recherche par Dufy, du style pictural qui caractérisera son œuvre. 

Le fauvisme se trouve également prégnant dans l’art de Dufy où il s’imprègne complètement de l’utilisation des couleurs en aplat et l’existence des cernes autour des aplats colorés. Cette influence se réalise auprès de Paul Signac et Henri Matisse. La Dame en rose, représentant l’épouse de Dufy, est alors un tableau s’ancrant parfaitement dans cette période fauve. Le Yacht pavoisé au Havre posera l’abandon définitif de l’impressionnisme par des silhouettes qui s’esquissent et des aplats de couleurs très récurrents. 

Enfin, Cézanne et le cubisme laisseront l’empreinte la plus présente dans l’art de Dufy, avec l’utilisation de couleurs intenses et d’une palette très cézanienne composée de vert, orange, jaune et ocre. Dufy abandonne alors les notions de perspectives traditionnelles, il ramène tous les éléments à la surface de la toile avec l’utilisation de mêmes gammes.

Le voyage de Dufy à L’Estaque marque cette ‘période’ cubiste et tous les tableaux relatifs à ce voyage montrent l’approche géométrique des formes et l’installation du point de vue multiple, inventé par Cézanne, qui sont accolés sur une même toile. Ces approches sont notamment visibles dans Arbres à l’Estaque et Le café à l’Estaque, étant deux œuvres significatives de la période. 

Le style propre de Dufy va alors composer avec toutes ces influences, s’affirmant au début des années 1920. Son style associe différents attributs : une palette cézanienne, la liberté dans les coups de pinceau, la présence d’aplats colorés, l’intérêt dans ses tableaux pour les arts décoratifs, la liberté de la couleur dans l’introduction de la lumière, la présence de formes géométriques ainsi que la dissociation entre les formes, les couleurs, et le dessin. Le Parc de Saint-Cloud de 1919 est, par exemple, un très bon tableau représentatif du style propre de Raoul Dufy. 

Pourtant, si le style de Dufy s’affirme, il ne vend que très peu de tableaux et va devoir recourir à l’illustration d’ouvrages afin de gagner sa vie. Il se dirige vers la gravure sur bois, en vogue chez les artistes pour pouvoir vivre. Ce choix le liera à Apollinaire avec qui une réelle compréhension artistique se noue, ce qui fera émerger Le Bestiaire, recueil de poème illustré par Dufy, où l’on retrouve des traits épais et un ombrage typique des gravures de Dufy. Cette rencontre tellement fructueuse entre les deux artistes amène la réédition du recueil du Poète assassiné, avec les illustrations de Dufy. 

Si Dufy semble se complaire dans plusieurs domaines artistiques, il est repéré par Paul Poiret, l’un des plus grands couturiers des années folles, et parfumeur français, qui aime s’entourer d’artistes pour créer ses étoffes et mettre en oeuvre ses défilés. Paul Poiret est en effet le créateur du premier univers global de la mode et opère par là une véritable révolution. Il s’entoure de Dufy pour perfectionner ses broderies et imprimés, nécessaire à la majestuosité de ses créations.  

Dufy sera ensuite recruté par Bianchini-Férier, une manufacture de soierie, dont il devient dessinateur et directeur artistique. Il est alors connu dans la maison pour son logo représentant la métamorphose d’une chenille en papillon au cœur des pétales d’une fleur, symbole de la maison, avec la création de la soie.

Dufy connaît par ces opportunités une nouvelle profession qui l’imprégnera et sera notamment visible dans ses tableaux. En effet, la représentation des vêtements, des tapisseries, des ateliers mettront en évidence des pièces de Bianchini-Férier. Ceci est alors visible dans Le Paddock où les personnages sont vêtus des soies de la maison. 

Par ailleurs, l’intérêt de Dufy concernant les arts décoratifs et mobiliers est très présent. On remarque la réalisation des fauteuils, de tables, étant très soignés, avec la présence d’assises florales et la réalisation soignée des tapisseries, comme dans son tableau 30 ans ou la vie en rose. Dufy réalise également de la peinture de vases avec une série de baigneuses représentant des nues réalisées avec de grandes arabesques et une dynamique de couleur. 

Si Dufy paraît maître de beaucoup de techniques, il est surtout l’auteur d’un grand chef-d’œuvre puisqu’il réalise, en 1937, l’une des plus grandes peintures du monde. 

La fée électricité, 60 m x 10 m, est commandée par la Compagnie parisienne de distribution d’électricité pour l’exposition universelle présentée sous le signe des arts et techniques mais surtout de la lumière. Le but de Dufy est ici de représenter le rôle de l’électricité dans la vie nationale. Il réalise alors sur la toile les différents savants et penseurs ayant eu un rôle dans la découverte de l’électricité : Thomas Edison, Marie et Pierre Curie, Isaac Newton, Heinrich Rudolf Hertz… Il y représente également le développement de l’électricité dans les campagnes et le changement de vie que celle-ci,procure, le progrès que l’électricité a permis. Enfin, Dufy érige en haut de la toile, les dieux de l’Olympe observant avec quiétude et satisfaction cette invention de l’homme. 

Cette œuvre sera réalisée en un an seulement, grâce au développement d’une nouvelle huile composée de colle et de vernis, permettant d’être rapide dû au séchage expresse de la composition et la conservation de la transparence et le rendu mat qu’elle garde. 

La fée électricité est aujourd’hui conservée au Musée d’art moderne de Paris. 



Sources :



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