Merci à Behnaz Jahed d’avoir partagé son histoire avec nous. L’interview est disponible en anglais et en italien.
En Afghanistan, les talibans s’opposent à la participation des femmes à toutes les formes de vie. D’après le rapport d’avril 2024 sur la situation des droits humains dans le monde de Amnesty International, « plus de 80 % des femmes journalistes ont renoncé à exercer leur métier entre août 2021 et août 2023 en raison des restrictions croissantes ».
Malgré ces violations constantes et flagrantes des droits de l’homme qui rendent les femmes invisibles, il existe toujours des voix féminines qui refusent de se taire. Pour certaines d’entre elles, cette tentative de crier devient fatale sous le régime prohibitif. Ensuite, il y a celles que l’on qualifie de « chanceuses », car elles peuvent témoigner plus librement de ce qu’elles ont vécu. Une « chance » qui perd tout son sens lorsqu’on réalise qu’elle n’est que la conséquence d’une nécessité tragique : fuir son pays d’origine.
Behnaz Jahed est originaire de Herat, en Afghanistan, où elle a obtenu une licence en droit et en sciences politiques. Là-bas elle a consacré quatre années à travailler dans les domaines des droits des femmes, des droits de l’homme et de la lutte contre la violence envers les femmes et les enfants, en collaborant avec l’AIHRC (Afghanistan Independent
Human Rights Commission), la CRDSA (Coordination Rehabilitation Services for Afghanistan) et l’ACSFO (Organisation du forum de la société civile afghane).
Animée par une passion profonde pour la défense de l’égalité des sexes, la réduction de la violence à l’égard des femmes et la lutte contre la discrimination, elle a travaillé et contribué au projet « Renforcement de l’accès à la justice pour les femmes touchées par la violence ». À la suite de l’arrivée au pouvoir des talibans en Afghanistan, elle a été contrainte de chercher refuge en Italie, où elle réside actuellement. Elle y a obtenu un master en droits de l’homme et gouvernance multi-niveaux à l’université de Padoue.
Behnaz Jahed incarne l’exemple d’une femme militante qui s’est investie pleinement, dans la mesure de ses moyens, pour aider d’autres femmes comme elle sur un plan horizontal, tout en étant consciente des risques importants qu’elle encourait.
La “chance” qui est la nôtre aujourd’hui est donc de pouvoir écouter ses paroles et d’avoir le droit de le faire. Notre “chance”, nous impose aussi le devoir, en tant que personnes ayant des droits et des libertés, de devoir nous informer et amplifier ces voix courageuses qui nous parlent et demandent à être amplifiées, afin qu’elles ne restent pas invisibles, du moins dans les pays dits démocratiques.
Pouvez-vous nous dire comment vous avez commencé à travailler sur la réduction de la violence contre les femmes et ce qui vous a motivé à emprunter cette voie ?
Après avoir obtenu mon diplôme de la Faculté de Droit et de Sciences Politiques, j’ai commencé à faire du bénévolat à la Commission Indépendante des Droits de l’Homme en Afghanistan, au sein du département des affaires féminines, où je me suis concentrée sur la réduction de la violence contre les femmes et la promotion de leur autonomisation. Plusieurs facteurs m’ont motivée à emprunter cette voie : mes études en droit et sciences politiques, mon éducation dans une famille où mon père mettait l’accent sur la lutte contre l’injustice et l’inégalité, et le fait de grandir dans l’une des villes les plus traditionnelles et religieuses de mon pays.
Lors de mes premières activités de bénévolat visant à éliminer la violence contre les femmes, j’ai ressenti une forte détermination à poursuivre ce travail. J’ai pris conscience des nombreux défis auxquels les femmes sont confrontées, notamment dans les conflits familiaux, où elles sont souvent les victimes. Les femmes et les filles des zones rurales étaient particulièrement vulnérables, car beaucoup étaient non scolarisées et ignorantes de leurs droits. Dans certains villages isolés, même leurs droits fondamentaux leur étaient refusés. Ces expériences ont renforcé ma volonté de m’engager pour la réduction de la violence contre les femmes et la défense de leurs droits.
Vous souvenez-vous d’un moment où vous avez pris conscience de l’importance d’être une femme qui aide d’autres femmes ?
Plusieurs facteurs m’ont motivée à commencer mon travail pour les droits des femmes, mais le plus significatif a été mon expérience de bénévole à la Commission Indépendante des Droits de l’Homme en Afghanistan. Durant cette période, j’ai été témoin de nombreuses femmes dans notre société qui étaient non scolarisées et ignorantes de leurs droits. J’ai vu de mes propres yeux à quel point elles étaient vulnérables et victimisées. Je voulais aussi défier l’idéologie dominante selon laquelle les femmes sont incapables de penser ou de travailler comme les hommes. Cette mentalité me troublait profondément, et j’étais déterminée à la combattre.
Quels ont été les principaux défis auxquels vous avez été confrontée en tant que responsable de la sensibilisation juridique et formatrice principale dans un environnement aussi complexe ?
Travailler dans une société complexe comme celle de l’Afghanistan était un véritable défi pour moi, en tant que jeune femme issue d’une minorité ethnique et religieuse. Les anciens et les hommes doutaient souvent des capacités des femmes. Lorsque j’ai commencé mon travail, les anciens ne m’acceptaient pas. Ils considéraient comme honteux qu’une jeune fille vienne dans leur village pour les conseiller et les aider à gérer des conflits familiaux ou des cas de violence contre les femmes. Participer à des séminaires et ateliers où une jeune fille instruite parlait des droits des femmes dans l’islam et remettait en question les traditions restrictives était difficilement acceptable pour eux.
J’ai même reçu des messages me demandant d’arrêter mon travail, certains affirmant que j’étais en train de détruire des familles en apprenant aux femmes leurs droits. Dans certains cas, je n’ai pas pu suivre les incidents de violence, car les familles interdisaient aux victimes d’avoir tout contact avec moi.
Cela vous a-t-il fait peur ? Pouvez-vous mentionner une histoire qui vous a particulièrement marquée ?
Bien sûr, j’avais peur. Ils ne montraient aucune bienveillance, surtout envers quelqu’un comme moi — une personne issue d’une minorité ethnique et religieuse travaillant pour les droits des femmes.
Certaines histoires m’ont profondément marquée. Une en particulier concernait une jeune femme d’environ 22 ans à l’époque. Elle était incroyablement talentueuse : elle étudiait à l’université tout en travaillant comme formatrice en couture pour les femmes de son village. Elle était aussi artiste, avec une passion pour la peinture.
Cependant, sa vie a pris un tournant tragique. Elle s’est fiancée à 19 ans, mais quelques jours plus tard, son fiancé l’a abandonnée pour partir en Iran. Il avait entendu des rumeurs dans le village disant qu’elle avait été amoureuse d’un autre garçon auparavant. Croyant ces commérages, il l’a quittée, s’est marié avec une autre femme en Iran et n’a jamais repris contact ni demandé le divorce.
Elle s’est retrouvée dans une situation très difficile, subissant une immense pression de la part de sa famille, de ses voisins et de ses proches. Même sa propre mère m’a dit qu’elle avait commencé à souffrir de problèmes psychologiques. Le seul soutien qu’elle avait venait de sa mère.
Après environ un an et demi, mes collègues et moi avons travaillé ensemble pour lui obtenir un divorce. Lorsqu’il a enfin été prononcé, elle était incroyablement heureuse. Jusque-là, elle ne pouvait pas refaire sa vie, se marier ou même voyager à cause des liens légaux persistants avec son mari absent. Elle souffrait énormément, entendant constamment des questions telles que : « As-tu des nouvelles de ton mari ? » ou « Savais-tu qu’il a maintenant un enfant et une seconde femme ? »
J’ai travaillé dur sur ce dossier, car sa vie avait été tellement difficile, et elle avait été abandonnée uniquement à cause des opinions et des rumeurs nuisibles des autres. L’aider à trouver la liberté et un soulagement face à cette situation injuste a été profondément gratifiant.
Que pensez-vous qu’il soit nécessaire de faire pour encourager un changement en Afghanistan, particulièrement sous le régime des talibans ?
Les femmes afghanes ont besoin de plus de soutien que jamais. Toutes les écoles secondaires, universités, cours privés, et même les instituts de formation en soins infirmiers sont fermés pour les filles. Les opportunités d’emploi pour les femmes sont extrêmement limitées. Elles ne peuvent pas sortir sans un tuteur masculin, comme leur père, frère ou mari. Même deux femmes parlant ensemble en public est interdit, car leurs voix sont considérées comme illégales. Ces restrictions montrent que les talibans sont déterminés à éliminer les femmes de la société. Avec ces règles strictes, il se pourrait bientôt qu’il n’y ait plus de femmes éduquées ni de femmes médecins en Afghanistan.
Les femmes afghanes ont besoin du soutien des Nations Unies, de la communauté internationale, des États-Unis et de l’Union européenne. Les femmes devraient être des membres égaux de la société. Après 2001, les femmes afghanes ont lutté pendant 20 ans pour leurs droits, mais les talibans les ont dépouillées de ces droits en raison de leur idéologie fondamentaliste et extrémiste.
Avez-vous remarqué des changements dans les communautés avec lesquelles vous avez travaillé durant ces trois ans et demi ? Quels signes de progrès avez-vous observés ?
Oui, j’ai vu des femmes devenir conscientes de leurs droits et se battre pour les faire valoir, même si cela n’était pas facile pour elles, car elles étaient sous un contrôle strict. (Dans les zones rurales où les normes traditionnelles étaient fortes et où les hommes détenaient la plupart du pouvoir, cela était particulièrement difficile.)
Malgré ces obstacles, les femmes étaient plus courageuses qu’avant pour revendiquer leurs droits. Elles prenaient aussi l’initiative de partager des informations sur les droits des femmes avec d’autres. Je me souviens de certaines femmes âgées qui disaient : « Nous sommes peut-être vieilles maintenant, mais nous transmettrons ces leçons à nos filles et petites-filles. »
Elles avaient acquis assez de courage pour essayer de changer leur situation. Par exemple, en cas de violence contre les femmes, elles étaient plus disposées à porter plainte contre les auteurs, que ce soit ouvertement ou discrètement.
Pensez-vous que nous pouvons faire quelque chose depuis l’Europe ?
Les personnes vivant en dehors de l’Afghanistan, en particulier en Europe, peuvent jouer un rôle vital pour amplifier les voix des femmes afghanes. Le monde et les organisations internationales sont restés largement silencieux, sans exercer de pression efficace sur les talibans. De plus, ils peuvent soutenir les femmes afghanes en offrant des bourses et des opportunités d’emploi en Europe. Dans l’ensemble, les femmes afghanes ont besoin d’un plaidoyer fort et d’une voix unie pour défendre leurs droits et leur avenir.
Comme le souligne Behnaz Jahed, les femmes afghanes ont besoin de soutien et nous avons une énorme responsabilité en tant que “société libre”.
Mettre en lumière la lutte des femmes afghanes face aux restrictions et à aux répressions systématiques des talibans est essentiel pour leur donner les moyens d’agir et raviver l’indignation collective. Il s’agit non seulement d’un acte de solidarité mais aussi de prévention, dans un monde où même dans les démocraties auxquelles nous pensons pouvoir faire confiance, les droits de l’homme sont en train de sombrer.
Ne laissons aucune femme afghane seule, qu’elle vive encore sur sa terre natale ou qu’elle ait trouvé refuge ailleurs. Refusons de censurer leurs histoires, nous qui avons le privilège et le devoir de les écouter et de les relayer.
original interview / english version : Women’s hope : a fight for Afghan women, by an Afghan woman
In Afghanistan, the Taliban oppose women’s participation in all forms of life. According to Amnesty International’s April 2024 report on the state of the world’s human rights, ‘more than 80% of women journalists gave up their profession between August 2021 and August 2023 because of increasing restrictions’.
Despite these constant and flagrant violations of human rights that make women invisible, there are still female voices that refuse to be silenced. For some of them, this attempt to cry out becomes fatal under the prohibitive regime. Then there are those who are described as ‘lucky’, because they can testify more freely about what they have experienced. Luck’ loses all meaning when you realise that it is only the consequence of a tragic necessity: fleeing your country of origin.
Behnaz Jahed hails from Herat, Afghanistan, where she obtained a degree in law and political science. There she spent four years working in the fields of women’s rights, human rights and combating violence against women and children, collaborating with AIHRC (Afghanistan Independent Human Rights Commission), CRDSA (Coordination Rehabilitation Services for Afghanistan) and ACSFO (Afghan Civil Society Forum Organisation).
Driven by a deep passion for defending gender equality, reducing violence against women and combating discrimination, she has worked on and contributed to the ‘Strengthening access to justice for women affected by violence’ project.
After the Taliban came to power in Afghanistan, she was forced to seek refuge in Italy, where she currently lives. She obtained a master’s degree in human rights and multi-level governance at the University of Padua.
Behnaz Jahed is an example of a woman activist who has done her utmost, within her means, to help other women like herself on a horizontal level, while being aware of the major risks she was running.
We are therefore ‘lucky’ to be able to listen to her words and to have the right to do so. Our ‘luck’ also imposes on us the duty, as people with rights and freedoms, to inform ourselves and amplify these courageous voices that speak to us and demand to be amplified, so that they do not remain invisible, at least in so-called democratic countries.
Can you share how you started working to reduce violence against women and what motivated you to take this path?
After graduating from the Faculty of Law and Political Science, I began volunteering at the Afghanistan Independent Human Rights Commission in the Women’s Affairs department, focusing on reducing violence against women and promoting women’s empowerment. Several factors motivated me to choose this path, including my studies in law and political science, growing up in a family where my father emphasized the importance of fighting against injustice and inequality, and living in one of the most traditional and religious cities in my country.
During my initial volunteer activities aimed at eliminating violence against women, I became determined to continue this work. I realized that women face numerous challenges and problems, particularly in family disputes, where they are often the victims. Women and girls in rural areas were especially vulnerable, as many were uneducated and unaware of their rights. In some remote villages, even basic rights were denied to them. These experiences strengthened my resolve to work towards reducing violence against women and advocating for their rights.
Do you remember a moment where you realised you were a woman helping other woman and the importance of that?
There were several factors that motivated me to start my work for women’s rights, but the most significant one was my experience as a volunteer with the Afghanistan Independent Human Rights Commission. During that time, I witnessed many women in our society who were uneducated and unaware of their rights. I saw firsthand how vulnerable and victimized they were. I also wanted to challenge the prevailing ideology that women are incapable of thinking or working like men. This mindset deeply troubled me, and I was determined to fight against it.
What were the main challenges you faced while working as a legal awareness officer and master trainer in such a complex environment?
Working in a complex society like Afghanistan was challenging for me, as I was a young girl from a minority ethnic and religious group and also community elders and men often doubted the abilities of women. When I first started my job, the elders did not accept me. They saw it as shameful for themselves that a young girl to come to their village to advise and assist them in managing family disputes or cases of violence against women. Participating in seminars and workshops where an educated young girl taught about women’s rights in Islam and challenged old traditions that restricted women for them was not to much acceptable.
I even received messages urging me to stop my work, as some believed I was destroying families by teaching women about their rights. In some cases, I was unable to follow up on incidents of violence against women because families would forbid the victims from having any contact with me.
Did it scare you? can you mention a story that particularly impressed you?
Of course, I was scared. They showed no kindness, especially toward someone like me a person from a minority ethnic and religious group working for women’s rights.
There were some cases that left a deep impression on me. One such case involved a young woman, around 22 years old at the time. She was incredibly talented—studying at university while also working as a tailoring trainer for women in her village. She was an artist, too, with a passion for painting. However, her life took a tragic turn. She got engaged at 19, but just a few days later, her fiancé abandoned her and moved to Iran. He had heard rumors in the village that she had once been in love with another boy. Believing the gossip, he left her behind, married another woman in Iran, and never contacted or divorced her.
This left her in a very difficult situation. She faced immense pressure from her family, neighbors, and relatives. Even her own mother told me that she began to experience psychological problems. The only support she had was from her mother.
After about a year and a half, my colleagues and I worked together to help her secure a divorce. When it finally happened, she was incredibly happy. Until then, she had been unable to move on with her life, marry, or even get engaged and travelling because of the lingering legal ties to her absent husband. She had been suffering immensely, constantly hearing questions like, « Do you have any news about your husband? » or « Did you know he has a child and a second wife now? »
I worked hard on this case because her life had been so difficult, and she had been abandoned solely because of the harmful opinions and gossip of others. Helping her find freedom and relief from this unjust situation was deeply rewarding.
What do you believe is needed to further support change in Afghanistan, especially now under Taliban rule?
Afghan women need more support now than ever. All middle schools, high schools, universities, private courses, and even nursing institutes are closed for girls. Job opportunities for women are severely limited. Women cannot go out without a male guardian, such as a father, brother, or husband. Even two women speaking together in public is prohibited, as their voices are considered illegal. These restrictions show that the Taliban are determined to eliminate women from society. With these strict rules, there may soon be no educated women or female doctors in Afghanistan.
Now, Afghan women need the support of the United Nations, the international community, the United States, and the European Union. Women should be equal members of society. Afghan women fought for their rights for 20 years after 2001, but the Taliban have stripped away those rights due to their fundamentalist and extremist ideology.
Did you notice any changes in the communities you worked with during those three and a half years? What signs of progress did you see?
Yes, I did. I saw women becoming aware of their rights and standing up for them, even though it was not easy for them, they were under strict control. (living in rural areas where traditional norms were strong, and men held most of the power. In the villages, people were often uneducated or had only completed elementary school, which made it even more challenging for women to assert themselves.)
Despite these obstacles, women were braver than before in pursuing and claiming their rights. They also took the initiative to share information about women’s rights with others. I remember hearing from some older women who said, ‘We may be old now, but we will stand and teach these lessons to our daughters and granddaughters.’ They had become courageous enough to try and change their situations.for example; If violence against women occurred, they were more willing to complain about the perpetrators, whether openly or discreetly.
Do you think we can do something from Europe?
People living outside Afghanistan, particularly in places like Europe, can play a vital role in amplifying the voices of Afghan women. The world and international organizations have remained largely silent, with no effective pressure being applied on the Taliban. Additionally, they can support Afghan women by offering scholarships and job opportunities in Europe. Overall, Afghan women need strong advocacy and a united voice to stand for their rights and futures.
As Behnaz Jahed points out, Afghan women need support and we have a huge responsibility as a ‘free society’.
Highlighting the struggle of Afghan women in the face of the restrictions and systematic repression of the Taliban is essential to empower them and rekindle collective indignation. This is not only an act of solidarity, but also of prevention, in a world where even in the democracies we think we can trust, human rights are being undermined.
Let us not leave any Afghan woman alone, whether she is still living in her homeland or has found refuge elsewhere. Let us refuse to censor their stories, we who have the privilege and duty to listen to them and relay them.
Thank you to Behnaz Jahed for sharing her story with us.
italian version / versione in italiano : Speranza per le donne : una lotta per le donne afghane, da parte di una donna afghana
In Afghanistan, i Talebani si oppongono alla partecipazione delle donne in tutte le forme di vita. Secondo il rapporto di Amnesty International sullo stato dei diritti umani nel mondo dell’aprile 2024, “più dell’80% delle giornaliste ha abbandonato la propria professione tra l’agosto 2021 e l’agosto 2023 a causa delle crescenti restrizioni”.
Nonostante queste costanti e flagranti violazioni dei diritti umani che rendono le donne invisibili, ci sono ancora voci femminili che rifiutano di essere messe a tacere. Per alcune di loro, questo tentativo di gridare diventa fatale sotto il regime proibitivo. Poi ci sono quelle che vengono definite “fortunate”, perché possono testimoniare più liberamente ciò che hanno vissuto. La “fortuna” perde di significato quando ci si rende conto che è solo la conseguenza di una tragica necessità: fuggire dal proprio Paese d’origine.
Behnaz Jahed viene da Herat, in Afghanistan, dove si è laureata in legge e scienze politiche. Qui ha trascorso quattro anni lavorando nel campo dei diritti delle donne, dei diritti umani e della lotta alla violenza contro le donne e i bambini, collaborando con l’AIHRC (Afghanistan Independent Human Rights Commission), il CRDSA (Coordination Rehabilitation Services for Afghanistan) e l’ACSFO (Afghan Civil Society Forum Organisation).
Spinta da una profonda passione per la difesa dell’uguaglianza di genere, la riduzione della violenza contro le donne e la lotta alla discriminazione, ha lavorato e contribuito al progetto “Rafforzamento dell’accesso alla giustizia per le donne vittime di violenza”.
Dopo l’ascesa al potere dei Talebani in Afghanistan nel 2021, è stata costretta a rifugiarsi in Italia, dove attualmente vive. Ha conseguito un master in diritti umani e governance multilivello presso l’Università di Padova.
Behnaz Jahed è un esempio di donna attivista che ha fatto il possibile, nei limiti delle sue possibilità, per aiutare altre donne come lei a livello orizzontale, pur essendo consapevole dei grandi rischi che correva.
Siamo quindi “fortunati” a poter ascoltare le sue parole e ad avere il diritto di farlo. La nostra “fortuna” ci impone anche il dovere, come persone con diritti e libertà, di informarci e amplificare queste voci coraggiose che ci parlano e chiedono di essere amplificate, affinché non rimangano invisibili, almeno nei Paesi cosiddetti democratici.
Puoi condividere come hai iniziato a lavorare per ridurre la violenza contro le donne e cosa ti ha motivato a intraprendere questo percorso?
Dopo essermi laureata presso la Facoltà di Giurisprudenza e Scienze Politiche, ho iniziato a fare volontariato presso la Commissione Indipendente Afghana per i Diritti Umani, nel dipartimento degli Affari Femminili, concentrandomi sulla riduzione della violenza contro le donne e la promozione del loro empowerment. Diversi fattori mi hanno motivato a scegliere questo percorso: i miei studi in diritto e scienze politiche, essere cresciuta in una famiglia in cui mio padre sottolineava l’importanza di combattere contro l’ingiustizia e l’ineguaglianza, e vivere in una delle città più tradizionali e religiose del mio paese.
Durante le mie prime attività di volontariato per eliminare la violenza contro le donne, ho deciso di proseguire su questa strada. Mi sono resa conto che le donne affrontano numerose sfide e problemi, soprattutto nelle dispute familiari, dove sono spesso vittime. Le donne e le ragazze delle aree rurali erano particolarmente vulnerabili, poiché molte erano analfabete e ignare dei loro diritti. In alcuni villaggi remoti, persino i diritti più basilari erano loro negati. Queste esperienze hanno rafforzato la mia determinazione a lavorare per ridurre la violenza contro le donne e difendere i loro diritti.
Ricordi un momento in cui hai realizzato di essere una donna che aiutava altre donne e l’importanza di ciò?
Ci sono stati diversi fattori che mi hanno motivato a iniziare il mio lavoro per i diritti delle donne, ma il più significativo è stata la mia esperienza come volontaria presso la Commissione Indipendente Afghana per i Diritti Umani. Durante quel periodo, ho visto molte donne nella nostra società che erano analfabete e inconsapevoli dei loro diritti. Ho visto in prima persona quanto fossero vulnerabili e vittimizzate. Volevo anche sfidare l’ideologia dominante secondo cui le donne non sono capaci di pensare o lavorare come gli uomini. Questa mentalità mi turbava profondamente e ero determinata a combatterla.
Quali sono state le principali sfide che hai affrontato lavorando come responsabile della sensibilizzazione legale e formatrice in un contesto così complesso?
Lavorare in una società complessa come quella afghana è stato difficile per me, poiché ero una giovane ragazza appartenente a un gruppo etnico e religioso minoritario, e anche perché gli anziani della comunità e gli uomini spesso dubitavano delle capacità delle donne.
Quando ho iniziato il mio lavoro, gli anziani non mi accettavano. Consideravano vergognoso che una giovane ragazza venisse nel loro villaggio per consigliare e assisterli nella gestione delle dispute familiari o dei casi di violenza contro le donne. Partecipare a seminari e workshop in cui una giovane ragazza istruita insegnava i diritti delle donne nell’Islam e sfidava le tradizioni antiche che le limitavano non era facilmente accettabile per loro. Ho persino ricevuto messaggi in cui mi si invitava a smettere di lavorare, poiché alcuni credevano che stavo distruggendo le famiglie insegnando alle donne i loro diritti. In alcuni casi, non potevo seguire gli episodi di violenza contro le donne perché le famiglie vietavano alle vittime qualsiasi contatto con me.
Avevi paura? Puoi raccontare una storia che ti ha particolarmente colpita?
Ovviamente avevo paura. Non mostravano alcuna gentilezza, specialmente verso qualcuno come me, una persona appartenente a un gruppo etnico e religioso minoritario che lavorava per i diritti delle donne.
Ci sono stati alcuni casi che mi hanno lasciato un’impressione profonda. Uno di questi riguardava una giovane donna di circa 22 anni all’epoca. Era incredibilmente talentuosa: studiava all’università e lavorava anche come formatrice di sartoria per le donne del suo villaggio. Era anche un’artista, con una passione per la pittura. Tuttavia, la sua vita prese una svolta tragica. Si fidanzò a 19 anni, ma pochi giorni dopo il fidanzato la abbandonò e si trasferì in Iran. Aveva sentito voci nel villaggio secondo cui lei era stata innamorata di un altro ragazzo. Credendo ai pettegolezzi, la lasciò, sposò un’altra donna in Iran e non la contattò mai più né divorziò da lei.
Questo la lasciò in una situazione molto difficile. Subì immense pressioni da parte della famiglia, dei vicini e dei parenti. Persino sua madre mi disse che aveva iniziato a manifestare problemi psicologici. L’unico sostegno che aveva era proprio dalla madre.
Dopo circa un anno e mezzo, i miei colleghi ed io abbiamo lavorato insieme per aiutarla a ottenere il divorzio. Quando finalmente accadde, fu incredibilmente felice. Fino ad allora, non era stata in grado di andare avanti con la sua vita, sposarsi o persino fidanzarsi o viaggiare a causa dei legami legali persistenti con il marito assente. Soffriva immensamente, sentendosi continuamente rivolgere domande del tipo: « Hai notizie di tuo marito? » o « Sai che ha un figlio e una seconda moglie adesso? »
Ho lavorato duramente su questo caso perché la sua vita era stata così difficile ed era stata abbandonata esclusivamente a causa delle opinioni dannose e dei pettegolezzi degli altri. Aiutarla a trovare libertà e sollievo da questa situazione ingiusta è stato profondamente gratificante.
Cosa ritieni sia necessario per sostenere ulteriormente il cambiamento in Afghanistan, soprattutto ora sotto il regime talebano?
Le donne afghane hanno bisogno di più sostegno che mai. Tutte le scuole medie, superiori, le università, i corsi privati e persino gli istituti infermieristici sono chiusi per le ragazze. Le opportunità di lavoro per le donne sono gravemente limitate. Le donne non possono uscire senza un tutore maschio, come un padre, un fratello o un marito. Persino due donne che parlano insieme in pubblico sono vietate, poiché le loro voci sono considerate illegali. Queste restrizioni dimostrano che i talebani sono determinati a eliminare le donne dalla società. Con queste regole rigide, presto potrebbero non esserci più donne istruite o medici donne in Afghanistan.
Ora, le donne afghane hanno bisogno del sostegno delle Nazioni Unite, della comunità internazionale, degli Stati Uniti e dell’Unione Europea. Le donne dovrebbero essere membri uguali della società. Le donne afghane hanno lottato per i loro diritti per 20 anni dopo il 2001, ma i talebani hanno spogliato quei diritti a causa della loro ideologia fondamentalista ed estremista.
Hai notato dei cambiamenti nelle comunità con cui hai lavorato durante quei tre anni e mezzo? Quali segni di progresso hai visto?
Sì, ne ho notati. Ho visto donne prendere coscienza dei loro diritti e difenderli, anche se non era facile per loro, dato che erano sotto stretto controllo. (vivevano in aree rurali dove le norme tradizionali erano forti e gli uomini detenevano la maggior parte del potere. Nei villaggi, le persone erano spesso analfabete o avevano completato solo la scuola elementare, il che rendeva ancora più difficile per le donne affermarsi.)
Nonostante questi ostacoli, le donne erano più coraggiose di prima nel perseguire e rivendicare i loro diritti. Prendevano anche l’iniziativa di condividere informazioni sui diritti delle donne con altre persone. Ricordo di aver sentito alcune donne anziane dire: « Ora siamo vecchie, ma staremo in piedi e insegneremo queste lezioni alle nostre figlie e nipoti. » Erano diventate abbastanza coraggiose da provare a cambiare le loro situazioni. Ad esempio, se si verificava una violenza contro le donne, erano più disposte a sporgere denuncia contro i colpevoli, sia apertamente che in modo discreto.
Pensi che possiamo fare qualcosa dall’Europa?
Le persone che vivono fuori dall’Afghanistan, in particolare in luoghi come l’Europa, possono svolgere un ruolo vitale nell’amplificare le voci delle donne afghane. Il mondo e le organizzazioni internazionali sono rimasti in gran parte in silenzio, senza esercitare pressioni efficaci sui talebani. Inoltre, possono sostenere le donne afghane offrendo borse di studio e opportunità di lavoro in Europa. Nel complesso, le donne afghane hanno bisogno di una forte azione di difesa e di una voce unita per sostenere i loro diritti e il loro futuro.
Come sottolinea Behnaz Jahed, le donne afghane hanno bisogno di sostegno e noi abbiamo un’enorme responsabilità come “società libera”.
Evidenziare la lotta delle donne afghane di fronte alle restrizioni e alla repressione sistematica dei talebani è essenziale per dare loro forza e riaccendere l’indignazione collettiva. Questo non è solo un atto di solidarietà, ma anche di prevenzione, in un mondo in cui anche nelle democrazie di cui pensiamo di poterci fidare, i diritti umani vengono minati. Non lasciamo sola nessuna donna afghana, sia che viva ancora nella sua patria sia che abbia trovato rifugio altrove. Rifiutiamoci di censurare le loro storie, noi che abbiamo il privilegio e il dovere di ascoltarle e trasmetterle.
Grazie a Behnaz Jahed per aver condiviso con noi la sua storia.