Une suite chaotique
Depuis 2020 en République Démocratique du Congo, il s’observe une suite de dérives dans le chef des églises de réveil. Des affaires choquantes, liées à la réalisation de sextapes de la part de certains chefs religieux, aux viols, aux avortements ainsi qu’aux harcèlements sexuels ; en passant par l’invention de fausses prophéties, de la pratique récurrente de l’escroquerie, du vol, et de l’aliénation mentale, ces pratiques font état d’une situation chaotique dans l’exercice du droit à la liberté de religion de la part de ces églises. Ainsi, il est impérieux d’arpenter les contours de ces dérives, puisque l’expansion de celle-ci est à la fois louable mais aussi critiquable au regard de leur nombre conséquent et de leurs activités discutables.
Les ASBL Confessionnelles
En République Démocratique du Congo en général et de manière assez particulière à Kinshasa capitale dudit pays, les églises dites de « réveil » sont, en vertu du droit positif congolais, des associations sans but lucratif (ASBL) à caractère confessionnel. A l’origine, ces dernières ont été considérées indépendantes, pourtant, elles sont le résultat de la mondialisation religieuse ; à partir de là, on assiste à leur prolifération et il est alors difficile de pouvoir même les dénombrer. L’exercice de ces associations confessionnelles est soumis à l’obtention de la personnalité juridique, ainsi qu’à la présentation d’un document renfermant les principes fondamentaux et les lignes maîtresses de l’enseignement religieux à dispenser ; ceci de manière à traduire clairement sa doctrine et pour permettre à l’Etat congolais de réaliser un suivi éclairé à ce sujet.
Les dérives religieuses
En clair, la “nuisance sonore” est le second nom de Kinshasa, puisqu’au sein de la première ville francophone du monde, on se complaît désormais à vivre dans le bruit. D’autant que ce désastre a pour émanation, en grande partie, ces églises de réveil ! Au-delà de cette nuisance sonore et dans certains cas, le tapage nocturne, s’ajoute une liste non-exhaustive ; viol, avortement, violation des normes relatives aux conditions de création des associations confessionnelles et aux conditions d’exercice ; aliénation mentale, manipulation politique, fausses prophéties, problèmes relatifs à la perception de dimes d’aumônes ainsi que des dons et présents ou encore problèmes liés à l’éligibilité au titre de fondateur ou de représentant légal…
Tout compte fait, au nom de « Dieu », les églises de réveil à Kinshasa troublent ouvertement l’ordre public, conception de la vie en communauté assurant la sécurité de l’État, de la famille ou de la personne humaine, ainsi qu’un certain ordre moral de la société établi par le législateur pour le bon ordre de cette dernière. En clair, ces “églisettes” bercent les gens à telle enseigne alors qu’elles ne sont pas globalement libératrices, en promettant un bonheur facile sous forme de miracles; elles freinent l’élan de responsabilisation de la population, elles sont une aubaine pour le régime politique en place !
Que dit la loi ?
Dans une dimension normative, le droit à la liberté de religion est porté tant par le corpus normatif international que régional mais aussi interne (Art 18 Déclaration universelles des droits de l’homme, Art 8 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, Art 22 de la constitution congolaise). De manière globale, ce droit garantit à toute personne la possibilité de choisir librement ses croyances, de les déclarer, d’en changer, et même la liberté au sens négatif octroyant à chaque individu le droit d’être contre tout attachement religieux ! Mais en sus, ce droit devrait être exercé selon les modalités fixées par la loi et sous réserve du respect de cette dernière, de l’ordre public, des bonnes mœurs et des droits d’autrui.
Le droit à la liberté de religion suscite souvent une controverse
Or, à ce jour ce droit est grossièrement et ouvertement abusé par les églises de réveil à Kinshasa. Un rétropédalage historique qui montre la loyauté de l’Eglise catholique dans la trinité coloniale (Eglise, Capital, Etat) au régime du roi (Léopold II), qui leur accordait des subsides en utilisant son pouvoir financier pour déployer les prêtres dans les régions où il souhaitait renforcer son influence. Dans une certaine mesure l’histoire se répète, quoi qu’à ce jour, l’Eglise catholique fait preuve en la matière, d’une attitude exempte de reproches. Ainsi, l’appréhension de cette thématique est à la fois problématique et controversée, c’est pourquoi le droit, par son applicabilité, s’érige pour établir la paix sociale en maintenant l’ordre public.
Une suggestion remède
Au bout du compte, eu égard à ce qui précède, il est de suggestion de renforcer l’efficacité judiciaire et administrative à l’endroit de l’Etat congolais. En sus, la prise en compte d’un corpus normatif approprié à l’endroit de ces églises ; notamment par l’adoption d’une loi ordinaire régissant la création, l’organisation et la suppression de ces dernières pour que la paix sociale et l’ordre public soient rétablis, et que soit exercé ce droit en conformité à la loi, aux bonnes mœurs, et au respect d’autrui, au sein de la République Démocratique du Congo et surtout au sein de sa belle capitale, Kinshasa.