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jeudi 25 avril 2024

Le journal des étudiantes et étudiants de Lyon 3

La justice et les violences sexuelles – Double peine pour les victimes

« Un mauvais traitement des victimes par les forces de l’ordre, c’est la double peine pour celles qui trouvent la force d’aller porter plainte. » Par ces mots postés sur son compte Instagram, Anna Toumazoff met des mots sur les sentiments de nombreuses femmes qui ont le courage d’aller porter plainte.  

En effet, l’an dernier, la féministe et activiste Anna Toumazoff relatait l’expérience vécue par les femmes au commissariat de Montpellier lors d’un dépôt de plainte pour des viols. 

A la suite de ces posts, le hashtag #DoublePeine a circulé sur les réseaux sociaux. Ce hashtag, repris par de nombreuses femmes, mettait en avant leurs expériences désastreuses dans leur commissariat. Un sentiment commun revient, ces femmes se sentent doublement violentées. 

Violentées par leur agresseur puis violentées et délaissées par un système judiciaire censé les protéger mais qui refuse de les entendre. Abandonnées et critiquées, ces femmes ne font plus confiance à une justice qui ne veut pas les aider. Et même si elles font le choix et ont le courage de porter plainte, elles pourraient voir leurs plaintes classées sans suite. 

C’est du moins ce que révèle un récent article du Journal Du Dimanche. Dans cet article, une jeune femme témoigne après avoir vu sa plainte classée sans suite. La raison ? Une dépêche ministérielle en date du 31 mai 2021 qui vise à réduire les stocks de dossiers non traités au sein des commissariats. Ainsi, les dossiers sont classés sans suite. Il n’y aura pas de poursuite pénale. Cela concerne 73 % des dossiers de violences sexuelles.

Cette dépêche n’est que le reflet d’une justice désemparée et non formée aux délits et crimes de nature sexuelle. Les victimes et leurs souffrances sont mises de côté, bafouées et oubliées. 

Aussi, si la majeure partie des plaintes pour des crimes ou délits à caractère sexuel est classée sans suite, certains crimes tels que les viols sont parfois décriminalisés afin de faire des économies et d’éviter de saturer les cours d’Assises déjà gorgées d’affaires en raison du manque important de magistrats en France. 

La décriminalisation consiste à omettre des faits au sein d’un procès-verbal ou d’un dossier qui pourraient changer la nature de l’affaire, la faisant passer d’un simple délit à un crime passible d’une vingtaine d’années d’emprisonnement. On évite ainsi de mentionner toute pénétration non consentie qui caractériserait le viol et qui nécessite la réunion de la Cour d’Assises. 

Les raisons de cette décriminalisation sont nombreuses : le coût des jurés, la lenteur de la justice…

C’est en ce sens que les Cours Criminelles ont été instituées par la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire. Ces dernières, sans jury, sont compétentes pour les crimes passibles d’une peine allant de 15 à  20 ans. 

L’absence de jury permettrait un système plus rapide et plus efficace qui éviterait des délais trop importants. Néanmoins ces cours étant encore expérimentales, il n’est pas possible de dire pour l’heure si elles sont efficaces. 

En réalité, la création de ces cours criminelles ne révèle qu’une seule chose ; la facilité qu’a le système judiciaire à mettre les femmes et plus généralement les victimes de violences sexuelles de côté. Pourquoi ce sont toujours ces catégories qui sont touchées ? Sont-elles insignifiantes ? Leur peine est-elle si peu importante ? 

La nécessité de classer les dossiers sans suite sans réelle raison autre qu’un manque de ressources et de formation des autorités concernées marquent la position des institutions face à ces violences. Pendant combien de temps encore ces victimes vont-elles être les souffre-douleurs et les oubliées de nos sociétés ? Quand y aura-t-il un réel changement ? 

On ne peut réellement prétendre mettre la cause des femmes comme priorité du quinquennat si leurs souffrances sont mises de côtés pour faire de simples économies ! 

Sources :
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