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jeudi 28 mars 2024

Le journal des étudiantes et étudiants de Lyon 3

Cartooning for Peace ou la défense de la liberté de la presse

Qu’est-ce que Cartooning for Peace ?

Tout commence par un ensemble de douze caricatures de Mahomet, publiées le 30 septembre 2005 au journal satirique danois Jyllands-Posten. Déjà, la poudre s’embrasait. Les images traversant l’Europe, elles ont entraîné une grave crise diplomatique entre les pays du Moyen-Orient et le Danemark, mêlant boycott, émeutes, mises à prix et tentatives d’assassinat. L’un des dessinateurs, Kurt Westergaard, appelant à la liberté d’expression et de la presse, fut rapidement soutenu par de nombreux collègues européens et internationaux. Dès lors, l’affaire prit une ampleur internationale et les dessins furent republiés en Égypte, Allemagne, Belgique et en France, faisant se multiplier les manifestations de mécontentement de certaines communautés musulmanes.

C’est de cet épisode qu’un an plus tard, le 16 octobre 2006, Kofi Annan, alors Secrétaire Général des Nations Unies et prix Nobel de la Paix, et Plantu, journaliste et dessinateur français aux journaux Le Monde et L’Express, organisèrent un colloque au siège des Nations-Unies, à New York, accompagnés de douze autres dessinateurs internationaux. Le thème du colloque : « Désapprendre l’intolérance – dessiner pour la paix ». À la suite de celui-ci fut donc créée la fondation internationale Cartooning for Peace, à Genève, et son homologue associatif à Paris.

Cartooning for Peace est donc “un réseau international de dessinateurs de presse engagés qui combattent, avec humour, pour le respect des cultures et des libertés ». Réunissant aujourd’hui 280 dessinateurs issus de 72 pays du globe, l’association revendique son engagement dans la protection des libertés fondamentales, de la démocratie, et notamment la liberté d’expression, se référant directement à l’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH), adoptée en 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies : « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ». L’association se veut également être un fervente défenseure du pluralisme des cultures et des opinions, combattant le conformisme intellectuel et les préjugés, sans jamais se risquer à accroître un conflit déjà existant.

Pour ce faire, Cartooning for Peace donne une visibilité à tous les dessinateurs et journalistes qui, dans l’exercice de leur talent, sont menacés ou emprisonnés. Et ils sont nombreux : d’après Reporters sans Frontières, ce sont 533 journalistes qui ont été incarcérés pour avoir exercé leur métier, en 2022 ; 57 autres exécutés ; 69 pris en otage et 49 portés disparus. Cartooning for Peace est donc un forum, un écran, un relai pour ces braves hommes et femmes luttant pour leurs droits. D’autre part, l’association met l’accent sur la pédagogie et l’humour. Elle réalise donc la plupart de ses actions en partenariat avec de nombreuses écoles du monde, mais aussi des prisons et des gouvernements. Tous les sujets sont traités : guerres, bien sûr, mais aussi écologie, justice, humanité, politique, égalité des genres.

Comment se traduit concrètement la défense de la liberté de la presse ?

Au titre des événements phares de la fondation depuis sa création, on retrouve ses expositions, provisoires ou permanentes. La première exposition provisoire de dessins de presse a eu lieu dans un endroit hautement symbolique pour la paix dans le monde : Jérusalem. En juin 2008, au cœur du conflit israélo-palestinien, treize dessinateurs internationaux ont fait vivre leur pluralité pour la paix. Une autre exposition exemplaire a trouvé son théâtre en France, particulièrement à Caen. Celle-ci, de 2010 à 2014 et intitulée « Tâches d’opinions », a été l’occasion d’aborder les thèmes de paix et d’égalité internationales, mais aussi d’organiser les deux premières rencontres internationales de dessinateurs de presse. Mêlant débats, discussions, illustrations et partages, il ne faisait aucun doute qu’à l’issue de cette exposition, la plume dépassait l’épée.

L’année 2011 fut aussi une année charnière pour le dessin de presse, la caricature et la satire. Preuve que l’influence de Cartooning for Peace est inspirante, la même année a vu fleurir en France deux grandes institutions de défense de la cause. En septembre, à Marseille, le Festival international (FIDEP) a vu le jour sous l’impulsion de Fathy Bourayou, dessinateur de presse et réfugié politique algérien. Accueillant chaque année une cinquantaine de caricaturistes, ce festival retrace tous les grands évènements de l’année, notamment à l’échelle de la société française. Contemporainement, en septembre 2011, la très petite ville de Saint-Just-le-Martel voyait s’ouvrir le Centre international de la caricature, du dessin de presse et d’humour, en vue d’accueillir son salon annuel, créé trente ans plus tôt par Gérard Vandenbroucke. 

Une autre année tristement charnière pour Cartooning for Peace, mais plus largement pour le dessin de presse, est évidemment 2015, ouverte en janvier par l’attentat visant les journalistes de Charlie Hebdo, faisant douze victimes dans cet arrondissement parisien. Outre la communauté politique et citoyenne internationale, l’ensemble des associations et fondations de défense de la liberté de la presse envoyèrent leur soutien et organisèrent des évènements. Ainsi, Cartooning for Peace s’associa à l’Union Européenne pour créer le « Cartooning for Human Rights » ; la ville de Saint-Just-le-Martel reconstitue dans son Centre le bureau de travail du dessinateur Georges Wolinski, assassiné ; et le FIDEP rend un hommage tout particulier à Tignous, lui aussi tué dans l’attentat.

Conclusion : Quel est l’état de la liberté de la presse aujourd’hui ?

Bien que défendue par de nombreux traités internationaux et nationaux, et par de nombreuses associations, fondations et institutions internationales et nationales, la liberté de la presse se trouve encore aujourd’hui trop menacée. Selon Reporters sans Frontières, jamais autant de journalistes n’avaient été persécutés en raison de leur métier qu’au cours de l’année 2022. D’autre part, on ne peut que constater, malgré toute leur bonne volonté, que les moyens accordés par les instances publiques aux collectifs de défense de cette liberté sont modérés : l’ONU, l’Union Européenne et l’État français jusqu’à aujourd’hui n’ont fait que soutenir moralement ces initiatives, n’accordant qu’assez peu de moyens matériels ou financiers. Finalement, les meilleurs acteurs dans la défense des droits des journalistes, ce sont les journalistes eux-mêmes.





Sources :
  • https://www.cartooningforpeace.org/
  • https://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights
  • https://www.lemonde.fr/attaque-contre-charlie-hebdo/article/2015/01/07/en-2005-l-affaire-des-caricatures-de-mahomet-au-danemark-et-la-solidarite-de-charlie-hebdo_4551135_4550668.html
  • https://rsf.org/fr/nouveau-record-du-nombre-de-journalistes-emprisonnes-dans-le-monde
  • https://fr.wikipedia.org/wiki/Festival_international_du_dessin_de_presse_de_la_caricature_et_de_la_satire
  • https://fr.wikipedia.org/wiki/Caricatures_de_Mahomet_du_journal_Jyllands-Posten

L’image ci-dessous est composée de quatre logos :

  • L’association Cartooning for Peace ;
  • L’Organisation des Nations-Unies (ONU) ; 
  • Le Festival international du dessin de presse, de la caricature et de la satire (FIDEP) ;
  • Le Centre international de la caricature, du dessin de presse et d’humour ;



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